Le 22 octobre, le gouvernement a lancé une nouvelle version de l’application de traçage du Covid-19. « TousAntiCovid » a remplacé StopCovid. Après l’échec de la première version, qui n’avait été téléchargée que 2,6 millions de fois depuis début juin, la forme et le contenu éditorial ont fait l’objet d’améliorations afin de rendre l'application plus attractive. L'appli propose ainsi un fil d'actualités en temps réel sur l'épidémie, ainsi que des chiffres sur son utilisation pour créer un effet d'entraînement et de motivation.
Pour le moment, ce relooking semble avoir l'effet escompté puisqu’en cinq jours, le nombre de téléchargements de l'application s'élève désormais à 4,2 millions, soit 1,6 million de plus depuis la mise en place de la nouvelle version, a annoncé mardi la ministre déléguée chargée de l’Autonomie, Brigitte Bourguignon.
Chez les médecins, la mise à jour et la reprise de l'épidémie ont en tout cas convaincu certains de s'y mettre.
J'ai téléchargé l'appli @TousAntiCovid #TousAntiCovid
— Le Doc (@Le___Doc) October 22, 2020
Mieux, relooking intéressant.
Le Capcha peut en rebuter quelques uns, n'hésitez pas à relancer la génération si nécessaire, surtout ce soir
Essayons tous de télécharger cette app, ça ne peut qu'aider dans cette pandémie. pic.twitter.com/2azh1ftwHS
Une arme supplémentaire dans leur arsenal
Le Dr Trystan Bacon, généraliste à Angers (Maine-et-Loire), n’avait ainsi pas installé la première version mais a décidé de télécharger la nouvelle. L’arrivée dans cette nouvelle phase épidémique, que beaucoup de médecins redoutaient, l’a convaincu de s’y mettre. « Je ne suis pas pour le solutionnisme technologique mais la situation fait qu’il faut réévaluer les moyens que nous mettons en œuvre. Nous voyons bien que l’enquête autour des clusters ne suffit pas et le gouvernement a fait un effort de transparence sur l’application », explique-t-il.
Le Dr Pierre-François Angrand, généraliste à Boeschèpe (Nord), n’a quant à lui téléchargé aucune des deux versions. Il juge qu'elle n’a aucune utilité pour les omnipraticiens. Et d'un point de vue de santé publique, « la question reste grande ouverte », ajoute-t-il. « Même dans les pays où une telle application a été largement téléchargée, il n’y a pas d'apport mirobolant », souligne le Dr Angrand. « Mais après, est-ce que cela a sa place dans le fameux schéma du gruyère et peut combler quelques trous ? Oui, pourquoi pas », reconnaît-il. « Si des patients veulent l’installer, je ne vais par leur déconseiller. Cela peut avoir une petite place dans la prise en charge globale ».
L’accompagnement des patients, c’est justement un autre argument qui a poussé le Dr Bacon à tester l’application. « Pour l’instant, le sujet n’a jamais été évoqué en consultation, mais je voulais savoir comment elle fonctionnait pour pouvoir répondre aux patients s’ils m’interrogent », confie-t-il. Le Dr Angrand considère de son côté qu’il y a déjà suffisamment à faire en travail d’éducation des patients « sur les autres mesures sanitaires, le port du masque etc. », pour ne pas passer de temps sur une « mesure qui a beaucoup moins d’impact » selon lui.
Réticences sur l'hébergement des données
Les réticences des Français concernant la protection de leurs données semblent également être partagées par les généralistes. « Je suis plutôt attaché au maintien des libertés individuelles face au besoin de tout contrôler, et le fait d’avoir fait une application centralisée peut expliquer une part de la défiance des Français », estime le Dr Angrand, qui reconnaît malgré tout que le gouvernement a fait un effort avec la publication du code source. « Mais on sait très bien qu’avec la centralisation des traitements des données, le big data, on peut réussir à réidentifier les gens, même si ce n’est pas la finalité de l’application », relève-t-il. Le Dr Bacon a lui aussi ses doutes sur l’hébergement des données, mais se dit prêt à « faire cette concession ». « Plus nous mettrons de pare-feu sur cette épidémie, mieux ce sera », estime-t-il.
Après quelques jours d’utilisation, il trouve l’application « très ergonomique » et plutôt « agréable ». « Elle n'utilise pas trop de batterie et c’est plutôt assez sympa d’avoir les chiffres sur l’avancée de l’épidémie », confie-t-il. Le généraliste s’étonne toutefois que les données ne soient pas complètement à jour. « Certaines, comme le taux de positivité, remontent au 24 octobre par exemple », constate-t-il.
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