Des précautions doivent être prises avec les progestatifs. C’est ce qui se dégage de nouvelles recommandations d’utilisation de ces médicaments publiées par l’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM) le 2 mars, suite à la première réunion de son comité scientifique temporaire (CST) dédié à la réévaluation de ces produits. Car même si les études manquent pour confirmer les soupçons, la classe thérapeutique pourrait bel et bien se révéler associée dans son ensemble à un surrisque de méningiome.
En 2019, trois progestatifs – l’acétate de nomegestrol (Lutényl), l’acétate de chlormadinone (Lutéran) et l’acétate de cyprotérone (Androcur) – avaient déjà été mis en cause dans des cas de méningiome, études épidémiologiques à l’appui. Avec à la clé de premières mesures visant à limiter et encadrer leur prescription.
Fin janvier 2023, l’agence a ensuite annoncé avoir repéré « des cas de méningiome survenus lors de traitements par d’autres progestatifs ». Dans ce contexte, un CST intégrant professionnels et patients a été réuni afin de se pencher sur ces progestatifs « autres que ceux à base d’acétate de cyprotérone, nomégestrol et chlormadinone ».
Des cas très évocateurs
Résultat : le CST estime qu’un « effet de classe des progestatifs ne peut être exclu ». En particulier, des « cas de méningiome déclarés (…) avec la médrogestone (Colprone) et la progestérone à 100 mg et 200 mg (Utrogestan et génériques) sont particulièrement suggestifs (…) compte tenu de la stabilisation ou la régression tumorale à l’arrêt du traitement », indique l’ANSM. Si bien que la notice de la médrogestone a déjà été mise à jour, et l’Agence européenne du médicament (EMA) a été alertée sur le cas de la progestérone.
Ce risque reste à confirmer et une étude d’Epi-Phare est attendue « prochainement » pour préciser les choses.
Quatre recommandations préliminaires
En attendant, le CST propose de premières recommandations d’utilisation pour quatre progestatifs : la médrogestone (Colprone 5 mg), la progestérone 100 ou 200 mg (Utrogestan), mais aussi la dydrogestérone (Duphaston 10 mg) et le dienogest (génériques de Visanne 2 mg).
D’abord, le comité considère tout antécédent de méningiome comme une contre-indication, « sauf exception à évaluer en réunion de concertation pluridisciplinaire sur la base du rapport bénéfice/risque individuel pour les personnes traitées et de la présence ou non d'alternatives thérapeutiques ».
De plus, il préconise de dresser avant toute nouvelle prescription un bilan de « l’ensemble des progestatifs déjà utilisés et leur durée d’utilisation ». « La prescription d’un nouveau progestatif en relais d’un traitement antérieur par acétate de cyprotérone, de chlormadinone ou de nomégestrol n’exclut pas le risque de méningiome », insiste le CST.
En matière de posologie, le comité incite à la parcimonie. « Le traitement doit être prescrit à la dose minimale efficace avec une durée d’utilisation la plus courte possible. »
Concernant la surveillance, la prescription doit être réévaluée tous les ans – avec une vigilance particulière « aux alentours de la ménopause » – et une IRM cérébrale réalisée en cas de symptôme évocateur : céphalée, trouble de la vision, du langage, de la mémoire ou de l’audition, vertiges, anosmie, etc.
Le CST ne recommande pas pour le moment de dépistage systématique par IRM, comme avec l’acétate de nomégestrol, de chlormadinone ou de cyprotérone.
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